samedi 30 mars 2013

Metamorphose - Prologue

Prologue
Svalbard (océan Arctique), 1er novembre 2012

Elvira se tenait étendue dans la neige polaire, le corps et l'âme rongés par la douleur. Autour d'elle de gros flocons s'agitaient, une aurore les nimbaient de couleurs vives.
Son corps n'était plus que douleur, pendant une minute qui lui sembla une éternité, elle revit un à un tous les moments de sa vie.

Elle vit sa mère et son père qu'elle avait tant aimés, elle revit le visage de son père à la mort de sa mère. Puis elle se souvint de sa métamorphose, la déchéance qui s'ensuivit, la douleur de son père, sa mort.
Elle revit Ludwig qu'elle avait aimé comme un mentor, comme un père, lui qui avait toujours été si bienveillant à son égard.
Elle pensa à Julia, qui avait été pour elle une sœur, une amie comme jamais elle n'avait espéré en avoir, elle qui se refusait d'aimer qui que ce soit.
Maintenant qu'il était trop tard elle se rendit compte qu'elle n'avait jamais cessé de les aimer.

Tout ces souvenirs s'enchainaient, tourbillonnaient, dansaient avec la douleur qui peu à peu l’enfonçaient dans l'obscurité.
La neige froide, si froide, recouvrait maintenant une partie de son visage. Un froid qu'elle n'avait jamais ressenti que dans son coeur.
Quelle bêtise que la vie! Fallait-il qu'elle soit sur le point de mourrir pour se rendre compte que son cœur n'était pas de glace?
Sa vie n'avait pas été parfaite, mais maintenant que le sommeil s'emparait d'elle, Elvira se rendait compte à quel point elle avait eut de la chance, à quel point elle aurait pu être heureuse si elle ne s'était pas fermée au bonheur.
Maintenant il était trop tard.

La douleur n'était plus qu'une sensation lointaine, qui pourtant la tenait clouée au sol. C'était comme si son corps et son esprit s'étaient scindés en deux entités distinctes, qui ne restaient liés que par une mince cordelette invisible.
Le blizzard ne parvenait à couvrir le son de voix hurlantes, mais elle ne parvenait plus à se concentrer sur le monde extérieur, les mots étaient lointains, et comme prononcés dans un langage qu'elle ne connaissait pas.
Elle n'était plus actrice de sa propre vie, elle regardait l'aurore, Yggdrasil se balançant doucement, sa lumière ambrée nimbant les alentours, tellement paisible; tout cela comme si elle les voyaient en rêve.
Elvira ne parvenait plus à distinguer la réalité, les images tournaient tout en restant immobiles, son regard ne parvenant à se fixer sur aucune d'entre elles.

Elle regarda sans le voir le frêne originel qui repartait dans sa demeure céleste, un long ruban de soie s'élevant, ondulant vers l'aurore sa matrice.
Il n'y avait plus de lumière au delà de ce que ses yeux pouvaient voir, les images se fondaient les unes dans les autres.
Les larmes cessèrent de couler sur ses joues, elle n'avait plus la force de pleurer.

Le visage de Nathanaël se tenait au-dessus d'elle, et c'était tout ce qu'elle pouvait voir à présent, le reste s’effaça.
Elle le vit pleurer et rire à la fois, il tenait sa main qu'elle ne sentait plus, elle voyait ses lèvres bouger.
Puis elle ne vit plus rien.
Elle senti sa main caresser son visage ensanglanté, puis ne senti plus rien, ni Nathanaël ni son propre corps.
Elle l'entendit murmurer "ta main dans la mienne". Puis elle n'entendit plus rien.
Alors elle ressenti pour lui de la haine. Elle haït Nathanaël, qu'elle avait aimé plus que tout.
Puis elle ne ressentit plus rien du tout.

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